Faudra-t-il payer la redevance sur la copie privée à l’achat d’une imprimante 3D ? C’est en effet ce que prévoit un amendement à la loi Macron déposé par les sénateurs socialistes. Outre l’effet mortifère d’une telle taxe sur cette industrie naissante, on peut se demander si l’impression 3D porte vraiment préjudice aux ayant droit.
L’impression 3D a le vent en poupe. Selon l’institut d’études Canalys, ce marché affiche une croissance de 68% sur 2014, avec 133 000 unités vendues pour un total de 2,9 milliards de dollars. La zone Europe Afrique Moyen-Orient concentre près d’un tiers des ventes de l’année écoulée. Cette hausse s’explique notamment par une baisse des prix des appareils et des composants, mais aussi par l’évolution des technologies, notamment la réduction des temps d’impression. Pour Gartner, d’ici 2018, 2,3 millions d’imprimantes supplémentaires s’inviteront chez les particuliers : 2015 incarne un tournant.

Le groupe socialiste au Sénat avait-il connaissance de ces chiffres lorsqu’il a déposé un amendement à la loi Macron dédié à l’impression 3D ? Les sénateurs ont en tout cas conscience des perspectives offertes par ce marché. L’amendement en question porte sur le Code de la propriété intellectuelle, qu’il modifie en ces termes :
1° Le second alinéa de l’article L. 311-1 est complété par les mots : « , ou de leur reproduction par une technologie d’impression en trois dimensions » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 311-5, après le mot : « support », sont insérés les mots : « ou de technologie ».
Contrefaçon ou reproduction licite, il faut choisir
Si vous ne l’avez pas encore compris, les articles du Code susmentionné concernent la redevance sur la copie privée. Concrètement, si l’amendement devait être voté, la redevance s’appliquerait alors aux appareils permettant de « reproduire en trois dimensions ». Elle serait alors prélevée sur les imprimantes 3D. On peut aussi s’interroger sur le statut des composants : bobines de fil plastique, résine liquide et autres polymères pourront-ils se voir imposer la redevance ?
Jusqu’à présent, seuls les supports y étaient soumis, mais l’amendement veut ajouter à l’article L311-5 « technologie ». Ce qui signifie que, désormais, une technologie permettant la reproduction d’une œuvre pourra être soumis à cette redevance. Une première qui pourrait bien créer un précédent (Cloud nous voilà !). Une fois votée, il reviendra à la commission dite Copie Privée de définir le taux de cette redevance. Laquelle a pour objectif de compenser les pertes subies par les ayants droit du fait de la copie privée licite.
Or, dans quelle mesure l’impression 3D constitue-t-elle un préjudice pour les revenus des ayant droit ? Éventuellement pour les figurines, certains jouets voire des sculptures (de petite taille)… Mais, concernant ces objets, s’ils dépendent d’une marque déposée, on entre dans le champ de la contrefaçon plus que de la copie privée. Enfin, et surtout, on est en droit de se demander si la redevance sur la copie privée ne sera mortifère pour une technologie émergente auprès du grand public.