Le vainqueur du dernier concours World Press Photo, Paul Hansen, aurait retouché son image ayant reçu le grand prix. Un internaute l’accuse en effet d’avoir modifié son image pour corriger les lumières.
Quelles sont les limites de la retouche d’image ? La récente affaire touchant le vainqueur du grand Prix du World Press Photo vient à nouveau nous interroger sur les pratiques des photographes de presse. Entendons nous bien, l’événement photographié par Paul Hansen est tout à fait réel. Présent à Gaza au moment des événements, le photographe a pris une série d’images représentant une procession d’hommes portant les corps d’enfants tués après le passage d’un raid Israélien en novembre 2012. L’auteur de ces images n’a pas ajouté ou enlevé d’éléments à sa composition. Non : ce qu’on lui reproche c’est d’avoir joué avec la luminosité de certaines parties de la photo.
L'image ci-dessus est celle qui a gagné le concours. Lorsque vous passez votre souris dessus, vous apercevez la photo originale parue en 2012 et donc non-retouchée.
Dans un post de blog très détaillé, Neal Krawetz explique que selon lui la photo a été largement retouchée pour donner aux personnages centraux de l’image une meilleure luminosité. L’image finale serait en fait le résultat de trois photographies différentes. Pour justifier son raisonnement, l’auteur se base sur l’historique des metadonnées de l’image. Il note 3 conversions de l’image à 3 dates différentes à partir des fichiers RAW (les données brutes des capteurs de l’appareil photo) avant la première sauvegarde de l’image à un format TIFF. Ces multiples conversions sont, selon lui, typiques d’une image composite qui utilise les données provenant de 3 photos différentes pour retoucher les lumières.
Le raisonnement de Neal Krawetz est expliqué en détail et très poussé. Il ne s’est pas contenté d’une simple observation à l’œil nu pour déterminer l’orientation des lumières, mais il s’est également reposé sur l’étude du niveau d’erreur, ou ELA. Cette technique se fonde sur la compression inhérente au format JPG. Si l’image n’est pas retouchée, le niveau d’erreur est théoriquement similaire sur l’ensemble de l’image. Mais si une retouche a été effectuée, les parties de l’image affectées par la retouche apparaîtront avec un plus haut niveau d’erreurs.
L’auteur de l’image se défend dans les colonnes de News.com.au : il explique avoir en effet développé les Raw de l’image avec différentes densités, afin d’utiliser la lumière naturelle de l’image. Une édition qu’il compare aux pratiques déjà existantes en photographie argentique, lors du processus de tirage de la photo.
La question semble donc porter principalement sur le niveau de retouche accepté par les standards des agences de presse plutôt que sur les détails techniques. Le jury du World Press Photo a apporté son soutien au photographe, expliquant que la photo a en effet été retouchée, mais que les modifications apportées ne dénaturent ni l’image ni la couleur originale du cliché.
D'où cette question : travailler sur les fichiers RAW est-il tricher ?